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Une majorité des outils chirurgicaux à main sont réutilisables car ils peuvent être stérilisés après une utilisation. Cependant le développement d’outils à usage unique est actuellement un segment en forte croissance particulièrement grâce leurs avantages en termes de coûts et d'hygiène. Pour les ingénieurs chargés de la conception des outils, la technologie du moteur est souvent un choix crucial, notamment entre la sélection d'un moteur CC avec ou sans balais.
Clémence Muron, Ingénieure d'applications à Portescap, un important fournisseur de moteurs chirurgicaux, examine les avantages des moteurs CC avec ou sans balais pour les outils médicaux réutilisables et ceux à usage unique.
Les ingénieurs d'outils électriques chirurgicaux choisissent entre développer une outil à usage unique ou réutilisable. Grâce aux progrès réalisés dans la conception des composants et des techniques de fabrication, il est aujourd’hui possible de produire des équipements capables de réaliser des opérations chirurgicales complexes à un prix réduit, justifiant parfois l’utilisation d’outils à usage unique. Ces avancées s'étendent notamment au niveau du moteur. Les améliorations pour la conception et la production des moteurs CC avec ou sans balais (BLDC) ont permis de réduire les prix de vente tout en augmentant les performances. Le coût de l'outil par opération est parfois suffisamment faible pour justifier une utilisation à usage unique. Le prix limité de l’outil à usage unique rend plus accessible l’achat d’un outil chirurgical spécifique, notamment pour le soin de maladie rare. Il permet aussi d'accroître la sécurité en éliminant le risque d'infection lié à une mauvaise stérilisation. Cela peut être une solution intéressante pour des hôpitaux ayant des investissements et ressources limitées.
Exigences au niveau de la performance des moteurs à usage unique
Si les exigences au niveau des performances des moteurs sont similaires pour les outils chirurgicaux réutilisables et jetables, les besoins par rapport à la durée de vie et au coût sont très différents. Un moteur spécifié pour un outil réutilisable a une durée de vie de centaines, voire de milliers d'opérations chirurgicales. Il est donc composé de pièces et de matériaux haut de gamme. Un moteur destiné à un outil à usage unique offre des performances similaires (pour une seule opération). Il doit être disponible en grande quantité et à un prix compétitif.
Lors de la sélection des moteurs pour les outils à usage unique, les ingénieurs font un choix entre les moteurs CC à balais et les moteurs BLDC (sans balais). Grâce à leur conception et à leur fiabilité, les moteurs BLDC constituent un choix typique pour une utilisation dédiée aux outils électriques réutilisables. Les avantages de la technologie BLDC augmentent les coûts par rapport au moteur CC à balais. Il est donc souvent difficile de choisir un moteur BLDC pour un outil à usage unique. Les ingénieurs peuvent travailler avec un fournisseur de moteurs connaissant bien les deux technologies afin d'identifier correctement les compromis en termes de performances et de coûts entre les deux technologies de moteurs CC (avec ou sans balais).
Moteurs CC avec ou sans balais
Si l'objectif d'un nouveau projet est de maximiser les performances et la fiabilité, l'ingénieur se tournera probablement vers la technologie BLDC (sans balais). La technologie sans balais permet un fonctionnement à des vitesses élevées (jusqu'à 100 000 tr/min) pendant une longue durée de vie. Dans un moteur BLDC, la commutation s'effectue électroniquement, soit par l'intermédiaire de capteurs magnétiques à effet Hall ou soit sans capteur mais avec un contrôleur spécial de type « sensorless ». Dans les deux cas, il n’y a pas d'utilisation de balais mécaniques. Le contact entre les composants rotatifs et les composants fixes du moteur est donc limité aux roulements à billes. Cela signifie que la durée de vie du moteur est principalement liée à la longévité des roulements, et que le moteur peut fonctionner à haute vitesse pendant une période prolongée.
En comparaison, dans un moteur CC à balais, la commutation est réalisée par des balais mécaniques (graphite ou métaux précieux) qui entrent en contact physique avec le rotor afin d’effectuer la connexion électrique. Dans ce cas, la durée de vie du moteur est principalement limitée à celle des balais. Les vitesses plus élevées entraînent une usure prématurée. Pour un outil à usage unique, la vitesse élevée n’est pas forcément un problème, étant donné la courte durée de vie requise ; cela dépendra fortement du cycle de service et des exigences de vitesse de l'application.
Les performances d'un moteur CC à balais varient également de manière significative en fonction de la conception du moteur. Par exemple, les moteurs CC à balais Portescap sont « sans noyau » alors que la plupart des moteurs à balais bon marché comportent un noyau en fer. Cela signifie que le rotor est uniquement composé d'une bobine et d'un arbre. La conception sans fer offre une inertie plus faible, ce qui se traduit par des performances supérieures en termes d'accélération et d'efficacité. Il élimine également le couple de détente (couple de cogging). Les mouvements à faible vitesse sont donc lisses et sans à-coup.
Pour les outils chirurgicaux réutilisables, les exigences en matière de durée de vie et de vitesse sont souvent constitué de moteurs BLDC. Toutefois, pour certaines applications à très hautes vitesses et nécessitant de d’une technologie à usage unique, un moteur CC sans balais peut parfois constituer une solution intéressante.
Implications en termes de coûts
Une fois que les exigences de performance sont satisfaites, le coût est souvent le facteur le plus important. Les moteurs sans balais sont plus coûteux par leur conception L’ingénieur doit également inclure le besoin d’un contrôleur spécifique pour la commutation des moteurs sans balais. Pour certaines applications, à très hautes performances, l’ingénieur devra encore ajouter des composants premium, tels que des roulements de haute qualité, des joints dynamiques spéciaux ou des aimants plus puissants . L’ajout de ces composants plus coûteux, en plus de la technologie sans balais peut rendre difficile la justification d'une stratégie d'outils à usage unique, ce qui orientera sur un outil réutilisable. En revanche, pour un moteur CC à balais, la commutation est gérée directement par les balais. Le contrôle du moteur est plus facile, un simple circuit PWM peut être utilisé pour réguler la vitesse. Les progrès au niveau de la technologie des moteurs CC à balais sans fer ont permis d'atteindre des performances plus élevées sans que cela ait un grand impact sur le coût. Par son prix plus attractif, le moteur à CC à balais sera souvent associé aux outils à usage unique. Comme la durée de vie de ce type de produit est très faible, il sera parfois même possible d'utiliser le moteur au-delà des spécifications recommandées.
Pour les outils à usage unique, le coût par opération chirurgicale est égale au prix d'achat total de l'outil. Avec un outil réutilisable, seule une petite partie du prix d'achat de l’outil détermine le coût par opération. Néanmoins, il ne faut pas oublier que pour ce second cas, l'outil électrique chirurgical doit être stérilisé avant l'intervention. Ce processus constitue un coût supplémentaire à prendre en compte lors de l'évaluation des frais totaux de l'opération. Par conséquent, le nombre d'opérations qu'un centre chirurgical peut effectuer par outil et le coût de la stérilisation entre chaque opération sont les principaux facteurs permettant de choisir entre un outil jetable ou un outil réutilisable. Un outil réutilisable a un prix d'achat plus élevé qu'un outil à usage unique. Toutefois, si le centre peut l'utiliser pour un nombre suffisant d'opérations, le coût moyen par opération est inférieur à celui d'un outil à usage unique (Figure A).
Un outil réutilisable plus coûteux à l’achat (en utilisant par exemple un moteur BLDC plus performant au lieu d'un moteur CC à balais bon marché) nécessitera bien sûr plus d'opérations pour devenir rentable sur le long terme. Les coûts de stérilisation augmenteront également le nombre d'interventions nécessaires pour atteindre le seuil de rentabilité sera donc décalé. Dans certains cas, l'outil jetable peut être préférable, quel que soit le nombre d'opérations chirurgicales (Figure B).
Notez que l'analyse ci-dessus compare simplement les coûts moyens des outils. Ceci ne tient pas compte d’autres spécifications qui ne doivent pas être négligés pour la décision. Par exemple, un outil réutilisable haut de gamme aura probablement de meilleures performances et des options supplémentaires (comme par exemple meilleure fiabilité, précision, plus de confort d’utilisation...) que n'importe quel outil à usage unique. Même si le seuil de rentabilité n'est pas atteint, la valeur apportée aux chirurgiens et aux patients est plus important. Par contre, dans d’autres cas, un outil réutilisable peut engendrer un risque d'infection dans le processus de stérilisation. Une stérilisation inadéquate de l'outil est dangereuse pour les patients. Cet article n'entrera pas dans le détail des méthodes de stérilisation. Il suffit de rappeler ici que toute discussion sur les outils électriques à usage unique ou réutilisables serait incomplète sans tenir compte de la sécurité des patients. Bien que la stérilisation se soit avérée très sûre et efficace, il existe toujours un risque, notamment selon les capacités des hôpitaux. Les outils à usage unique peuvent être stérilisés et emballés par le fabricant de l'outil, et cette approche accroît la sécurité des patients.
Exemple :
Une équipe de R&D d'une entreprise de dispositifs médicaux développe un nouvel outil avec les spécifications suivantes :
- Un outil électrique chirurgical à main.
- En cas de défaillance de l’outil il y aura de graves complications pour le patient
- Le diamètre du moteur ne doit pas dépasser 17 mm
- Le moteur doit fonctionner en continu à 5 mNm à 15 000 tr/min
- L'appareil est alimenté par une batterie, le moteur doit donc fonctionner avec un rendement minimum de 80 %, une tension comprise entre 6 et 9 V et un courant de 1,5 A maximum
- L'intervention étant sensible aux coûts, le moteur ne doit pas contribuer pour plus de 20 dollars au coût de chaque opération
- L'équipe de conception préfère un outil jetable, mais un modèle réutilisable est possible
- Possibilité d'utiliser la technologie des moteurs CC avec ou sans balais
Les ingénieurs commencent par s'engager avec un fournisseur de moteurs qui offre à la fois les technologies CC avec ou sans balais et qui bénéficie d'une vaste expérience sur le marché des outils électriques chirurgicaux. Le fournisseur de moteurs sélectionne dans chaque technologie un moteur dont le diamètre est inférieur à 17 mm et qui correspond au mieux aux exigences de performance. Ces options sont résumées dans le tableau ci-dessous :
Moteur CC à balais |
Moteur CC sans balais |
|
Encombrement | Ø 17 mm, longueur 26 mm | Ø 13 mm, longueur 47 mm |
Couple continu maximum (mNm) |
5,7 mNm | 9 mNm |
Vitesse maximale recommandée (tr/min) |
10 000 tr/min | 100 000 tr/min |
Contrôleur |
PWM | Contrôleur BLDC utilisant les capteurs à effet Hall |
Tension requise |
7 V | 9 V |
Consommation de courant |
1,4 A | 1,2A |
Puissance de sortie |
9,8W | 10,8W |
Rendement au point de fonctionnement |
80% | 72% |
Exemple de prix |
15 $ | 160 $ |
Les deux options répondent à l'exigence de couple de 5 mNm. Le couple maximum continu de 5,7 mNm du moteur CC à balais n'est que légèrement supérieur au point de fonctionnement. Cela réduira la durée de vie du moteur, mais pas suffisamment pour être un problème pour une seule intervention. Le principal problème est la vitesse de 15 000 tr/min, qui est supérieure à la vitesse maximale du moteur CC à balais. Cela peut convenir pour une seule intervention, mais le risque d'échec pendant l'opération est accru. Le coût du moteur est suffisamment faible pour qu'il puisse être utilisé une seule fois.
Le moteur BLDC peut facilement répondre aux exigences de vitesse et de couple pour un grand nombre opérations chirurgicales. Toutefois, le rendement est légèrement inférieur à l'objectif de 80 %, et le prix est bien supérieur à 20 dollars. Pour que ce moteur BLDC soit rentable, il faudrait qu'il soit utilisé pour au moins 8 opérations chirurgicales.
En raison des exigences de performance et de prix de l'application, les ingénieurs doivent choisir entre un moteur CC à balais à usage unique ou un moteur BLDC réutilisable. Un moteur CC à balais réutilisable n'est pas possible dans cet exemple en raison du risque de défaillance pour plusieurs opérations, et un moteur BLDC à usage unique n'est pas possible en raison de son coût.
La décision consiste alors à déterminer si le risque de défaillance d'un moteur CC à balais lors de sa première opération chirurgicale en raison de sa vitesse élevée est acceptable. Si ce n'est pas le cas, les ingénieurs peuvent réduire la vitesse requise, ce qui se traduira par un outil moins performant. Ils peuvent également opter pour le modèle réutilisable et accepter un rendement moindre. Ils devront également concevoir le reste de l'outil pour qu'il soit stérilisable. Leurs clients stériliseront l'outil entre deux utilisations. Ces deux facteurs doivent être pris en compte lors du calcul du coût total par opération.
Conclusion
L'augmentation de la popularité des outils électriques chirurgicaux jetables a entraîné une demande accrue de moteurs CC à balais pour atteindre les objectifs de conception. Le choix de la technologie dépend fortement de l'application. Les ingénieurs de dispositifs chirurgicaux ont tout intérêt à collaborer dès le début de leur cycle de conception avec un fournisseur de moteurs qui possède l'expertise en matière de conception chirurgicale, ainsi qu'une gamme de solutions BLDC et CC à balais.